Le blog de Julien Arbez
11/06/2018
Prospections
Le calme est revenu. Il y a un quart d’heure à peine, il pleuvait encore à torrent sur les fermes et leurs prés. Quelques éclairs avaient grondé la terre et les bourrasques avaient fait taire les oiseaux. Le calme est revenu et les oiseaux se remettent à chanter. Comme s’ils n’avaient jamais arrêté.
Les feuilles se taisent et la mélodie reprend. Les moutons se remettent à table et les chevaux reprennent leur ronde.
En lisière de forêt, un chevreuil arrive d’un pas rapide. Puis il s’arrête dans de grandes tiges en fleur et s’offre un gras repas.
Devant moi, à quelques mètres, une libellule déprimée se repose sur une tige d’arbuste étêtée. Autour d’elles, les fougères font grimpette et les renouées s’apprêtent à fleurir. Je suis devant le terrier de renards, et une nouvelle histoire commence…
Il est là. Il vient de sortir d’entre les fougères et dresse le museau. Il a bien remarqué quelque chose de nouveau. Mais ce quelque chose ne bouge pas et reste silencieux.
L’insouciance du jeune renardeau reprend vite le dessus et la balade découverte peut vite reprendre.
Tout est bien nouveau à l’extérieur du terrier ! On y entend des insectes qu’on voit passer maladroitement devant son museau, et chaque jour on y sent des odeurs nouvelles.
Parfois les renardeaux prospectent seuls les environs immédiats du terrier, parfois ils se retrouvent dans les herbes pour siester flanc contre flanc, ou la tête dans l’oreille…
Tout est sujet à la découverte et l’apprentissage se fait de rencontres en rencontres. Ils se familiarisent avec le chant de la fauvette, le galop des chevaux, les allées et venues des voisins du petit lotissement.
Les cris des corneilles ne les interpellent plus, le bruit des avions non plus.
Les allées et venues des jeunes et des adultes ont tracé un véritable chemin dans la mousse et les aiguilles. Ce sont d’abord ces petites coulées qui sont privilégiées.
Parfois l’un d’entre eux sort du sentier et monte une butte, « entre » sous les branches basses d’un épicéa, ou fait le tour d’un bouquet de fougères. Un petit coup de langue par ici, une petite reniflade par là. Un bond, un arrêt.
Une marche lente, puis encore un bond. Y avait ‘il un insecte à attraper ou bien un campagnol sauteur imaginaire ?
Il me semble, après quelques affûts que les renardeaux sont trois. Peut-être quatre, j’ai un doute. Les jours qui arrivent me le diront. Pour le moment pas d’affût au lever du jour ou à la tombée de la nuit pour ne pas risquer de croiser la mère devant le terrier. Car bien qu’immobile, je ne suis pas camouflé et la mère aurait vite fait de me repérer. Mais les renardeaux vont grandir et leur méfiance avec.
D’ici quelques jours j’installerai un filet de camouflage que je laisserai sur place le temps de quelques semaines. Je bénis les moments chers à venir.
Ce soir, le soleil a réussi à percer les nuages avant de passer l’horizon.
Au travers du bosquet qui se trouve en face de moi, les derniers rayons rouges passent et viennent caresser les grandes tiges fleuries des renoncules, des narcisses et des carottes sauvages. Et les empêchent de mourir au sol.
C’est commun et tellement beau à la fois. Son côté éphémère donne encore plus de beauté à la scène. C’est comme une représentation unique. C’est une représentation unique.
Tout est réuni. La lumière, la douceur, la vie.