Le blog de Julien Arbez
19/11/2020
Les couleurs à l’honneur
L’automne fait de la résistance ! Les dernières feuilles d’érables tombent dans les sous-bois d’altitude tandis que des sorbiers chantent des dizaines de merles et de grives.
Le gel de la nuit a déposé une fine couche de givre sur les arbres et le chemin. Aussitôt le soleil levé, voilà les cristaux brillants qui se transforment en perles de pluie.
Les cynorrhodons ont bien gelé, ils sont prêts à être cueillis pour être transformés en confiture !
Une buse variable vient de fondre sur un rongeur de la pâture. Il a été trop rapide pour elle ! Un regard à gauche, puis derrière, et voilà le rapace qui regagne son perchoir pour une nouvelle dose de patience.
Les pies, plus opportunistes, se contentent, elles, de graines, d’insectes et de cadavres qui croisent leur chemin.
Un peu comme le sanglier ! Celui-là n’a pas souhaité se retourner pour me faire un sourire.
Il faut dire qu’il doit être dur de sourire quand on passe son temps à fuir les chasseurs et leurs chiens…
Les passereaux, cette année, ne sont pas en reste ! les baies nombreuses et juteuses, les faînes et autres samares sont autant de fruits et légumes qui seront engloutis des mois durant.
A la faveur d’un coucher de soleil, le ciel s’embrase. Se réveillent la chouette hulotte et le blaireau baroudeurs. Surprises de taille pour les couche-tard qui guetteront le jardin à la lueur de la lune !
Le lendemain matin, l’air est frais. Une poule de tétras piète en lisière en quête des dernières graines encore accessibles de l’automne avant que la neige ne les recouvre. Quelle rencontre magnifique !
Sur la falaise au tichodrome, le soleil ne tape pas encore. L’oiseau papillon vient d’arriver (après trois heures d’attente quand même !), de son vol saccadé et acrobatique. Il s’agrippe aux aspérités calcaires, la tête en bas, guettant syrphes, poissons d’argent et araignées.
C’est la quatrième année de suite que j’affûte le tichodrome à cet endroit. Mais je ne sais pas dire si l’individu que j’ai devant les yeux est le même que les années précédentes. Il me semble que non, car l’oiseau visite des cavités délaissées par les oiseaux les années précédentes. Ou alors est-ce simplement un changement d’envie, un changement de comportement ?
Vivement les falaises blanchies par la neige et les glaçons qui pendent tout en lumière !
Pour terminer, je vous présente le petit dernier, photographié ces derniers jours suite à un échange avec une amie. En forêt, à bonne distance d’un village, se trouvent deux faisans vénérés à la parure aguichante.
Deux faisans vénérés dans le haut-Jura ! La seule fois que j’en avais vu, c’était en Bresse et je devais avoir 12 ans. Le faisan avait couru se mettre à l’abri sous le fourré et je ne l’avais pas retrouvé. Cette fois-ci, je prends ma revanche !
Mais, me direz-vous, que font ces deux faisans chinois dans le Jura ? Nul besoin d’étude génétiques ou de traçage des déplacements. Non, c’est sans doute beaucoup plus simple : il s’agit sûrement de faisans lâchés dans les parages par les plus grands écologistes de France. Dans le seul but d’être plombés à grands renfort de chiens excités. Et de fusil lustré.
Triste réalité. En France, pas moins de 14 millions de faisans d’élevage sont lâchés chaque année. Jusque dans des endroits où, si par miracle ils survivent aux plombs, aux voitures et aux renards, ils ne passeront de toute façon pas l’hiver. Heureusement que les chasseurs sont là pour rétablir l’équilibre. Quelle foutaise, mais quelle foutaise ! (sans parler que l’espèce est en voix de disparition en Chine, son pays d’origine, où il reste moins de 10000 individus en nature)
Quoi qu’il en soit, ces deux faisans qui grignotent les fruits de hêtres à couvert sont magnifiques. Presque irréels. Des couleurs chatoyantes, une queue longe et fine qui se promène au sol tel un serpent, font du faisan vénéré un oiseau qui marque les esprits.
Je prends beaucoup de plaisir à les observer, écouter leur communication douce, à les suivre à distance dans cette forêt nourricière. Ils savent garder leurs distances mais me tolèrent sans problème. Celui qui les nourrissait dans leur volière me ressemblait sans doute un peu !
Plein de courage à vous chers faisans. Et belle découverte du Jura.