Le blog de Julien Arbez
12/08/2020
Le temps des papillons
Août a posé ses valises sans que juillet n’ait son mot à dire. Et août n’est pas venu seul : il a apporté sans son bras les chaleurs estivales, les vacanciers aquatiques, les glaces en terrasses. C’est pour la période la moins propice à la photo animalière, et celle d’un break post printanier attendu et mérité.
C’est la saison des papillons, particulièrement du grand apollon, un insecte qui mérite bien son nom ! Sur les prairies sommitales pâturées par les troupeaux, il virevolte durant quelques semaines seulement à la recherche de fleurs à butiner et dans l’espoir de se reproduire.
Dans une prairie rocailleuse en lisière de forêt, s’agite un oiseau costaud au bec long comme un poignard. Le pic vert cherche sur les têtes de roches les fourmis qu’il remarque ici facilement et qu’il attrape grâce à sa très fine langue collante.
D’autres oiseaux viennent lui tenir compagnie et cherchent aussi leur part de gâteau.
Derrière une ferme perpétuant la tradition fromagère, une petite bête apparait puis disparait entre les traverses d’un caillebotis. Une, puis deux hermines s’amusent à se poursuivre dans l’indifférence générale des vaches assommées par la chaleur.
« On les voit régulièrement depuis une semaine environ, me dit le fromager déjà habitué de ses voisines. Il y en a 4 ou 5 ! ».
Couché parmi les bouses (il faut parfois faire des sacrifices !), je m’amuse à voir apparaitre puis disparaitre les petites bouilles survitaminées dans le son des sonnailles et des mouches qui bourdonnent. Pas de photo extraordinaire, mais que de plaisir !
Les marmottes jurassiennes, cette année, ne semblent pas nombreuses. Est-ce à cause du manque d’enneigement l’hiver précédent ou certains individus se font-ils plus discrets cet été ? Je doute que l’hibernation se soit bien passée…
Loin des sommets jurassiens, les champs de maïs de la plaine de Bresse se noient chaque matin dans les nappes de brouillard dérivant au gré des courants d’air.
Au lever du soleil, une chevrette accompagnée de ses deux bambins avance le pas léger, broutant çà et là les pousses jaunies enraidies par le soleil. Lièvres et renards regagnent aussi le couvert dans une ambiance encore fraiche.
Le ventre dans l’eau, quelques grenouilles vertes se manifestent de leur chant répétitif. Mais malgré la chanson, pas facile de repérer le chanteur !
Le soleil monte, fait grimper la température sous l’affût flottant. Je transpire, l’eau qui m’arrive au nombril n’arrive plus à me rafraichir. Quelques moustiques se disputent mon sang, emprisonnés entre les 4 murs de tissu qui m’entourent.
Un héron cendré tend le cou, sceptique à l’idée que je ne sois qu’un objet inerte et dérivant. Sa méfiance le fait s’envoler vers la rive opposée. Même en affût flottant, certains hérons sont difficiles à tromper. Cette méfiance, du temps où l’oiseau n’était pas protégé, a sans doute été la clef de sa survie.
Pas de martin-pêcheur cette fois-ci. Je pensais arriver au bon moment, mais la nichée précédente s’est déjà émancipée et la suivante n’est pas encore sortie du terrier. J’entends quelques martins plus que je ne les vois, deux adultes sans doute occupés à nourrir les jeunes ou l’adulte au nid.
La canicule s’étant frayée un chemin jusque dans les montagnes, j’ai décidé de retourner à l’eau, mais cette fois-ci plus près de chez moi, dans la Bienne voisine. Un groupe de canards colverts se met en mouvement dans le contre-jour de 10h, nageant parmi les étoiles au gré des vagues et du courant.
Un cincle plongeur s’arrête quelques minutes sur un rocher calcaire pour un brin de toilette, avant de repartir par-delà les galets et les libellules.
Une jeune bergeronnette des ruisseaux se promène sur les rives de la rivière. Sautillant de pierre en pierre, elle recherche dans la mousse comme dans les airs des insectes à attraper.
Aujourd’hui la sortie a été peu fructueuse. Le manque d’eau m’a rendu la tâche difficile. Les cailloux affleurant à la surface bloquant le passage à ma structure flottante. Après avoir dérivé durant deux petites heures, je me relève et porte l’affût en remontant la rivière, incapable d’avancer à plat ventre dans 20cm d’eau et à contre-courant.
Cette après-midi j’irai au lac avec ma fille. D’ici là, j’aurai un peu de temps pour me « désensauvager » !