Le blog de Julien Arbez
01/12/2017
Frimas
Ecoutez, écoutez ! Ca craque sous vos pieds ! Les mains dans les gants, vous évoluez sur ce petit chemin givré, bordé de plantes en tous genres et de fils barbelés.
Voyez sur les feuilles orangées les cristaux de givre bleutés !
Cherchez les fruits gelés du cynorhodon pour en faire d’exquises confitures !
Fouinez du regard dans la haie pour dénicher ces plantes étincelantes sous les premiers rayons du soleil. Laissez-vous aller à la poésie du moment, respirez profondément, soyez tout ouï. Et vous aurez voyagé !
De l’autre côté de la haie bordant le chemin, de petits monticules verts laissent apparaitre quelques-unes de leurs blanches dentelles.
Un chevreuil cherche en lisière ou gratter de la patte pour accéder à de petites miettes de végétation. La période de disette a commencé, gare aux dépenses énergétiques inutiles.
Mais c’est surtout du côté de la forêt de pente que les choses ses jouent : les derniers flocons tombés en masse sur le Haut-Jura n’ont pas calmé les ardeurs des chamois intrépides :
le rut tire sur s fin mais quelques chèvres n’ont semble-til pas encore eu leurs chaleurs, et les boucs des alentours le savant bien !
Voilà qui justifie bien un regroupement entre mâles et femelles et quelques courses dans la poudreuse légère de novembre.
Loin de ces considérations sexuelles, un renard trottine dans la vallée en pleine journée, avec l’espoir immense de grignoter quelques campagnols trop peu méfiants. C’est que bientôt, les flocons vont revenir et alourdir encore un peu plus les hêtres et les épicéas.
Le temps est venu pour l’hiver de poser ses souliers, s’installer, se mettre à l’aise. Finies les couleurs d’automne, les odeurs de champignons et les moucherons infatigables. Voici venu le temps du repos des plantes, et du combat des animaux contre le manteau neigeux.
Un des animaux jurassiens les mieux adaptés à l’hiver est sans doute le chamois : des sabots larges pour porter sur la neige, un épais manteau d’hiver assombri pour mieux emmagasiner la chaleur, et même de petites semelles antidérapantes entre les sabots qui lui permettent d’adhérer aux rochers de marcher comme avec des raquettes. N’empêche que les premières grosses neiges de l’année sont surprenantes ! pas de quoi abasourdir les chamois de la vallée qui en ont vu d’autres !
Siestes dans la neige et recherche de pitance alternent tout à tout dans le calme hivernal. par milliers tombent les flocons sur les fourrures qui blanchissent.
Jeunes et adultes empruntent les mêmes coulées pour économiser leur énergie. Les derniers mâles énervés commencent à se calmer, même s’ils retroussent les babines de temps en temps pour veiller les dernières chèvres en chaleurs.
Chut. L’hiver ne fait pas de bruit, mais chacun sait qu’il est là. Pour le meilleur et pour le pire. Jusqu’à l’accalmie.
Durant deux bonnes heures, les chutes de neige ont recouvert mes pas. Les nuages restent là mais arrêtent de pleurer. Un monde en noir et blanc refait surface, reflété sur le lac entre quelques barques colorées amarrées près de la roselière.
Puisque l’hiver risque d’être long, et puisqu’il joue avec nos perceptions, jouons avec l’hiver !