Le blog de Julien Arbez
20/08/2019
Ecailles, poils et plumes
Il fait chaud, des larmes de sueur perlent au compte-gouttes, mon cœur bat fort, mon chapeau n’est pas de trop pour faire écran au soleil violent. Autour de moi, les papillons qui brassent l’air prêtent leurs couleurs aux fleurs qui fatiguent. Devant nous, à la verticale sur le mur, un lézard est aux aguets. Une mouche se laissera-t-elle approcher ?
En remontant le chemin qui mène à la chartreuse de Vaucluse, les feuilles bruissent régulièrement sans que je n’aperçoive personne. Les responsables de ce remue-ménage ne sont autres que des lézards verts, que je vois réapparaitre moins de 5 minutes après leurs fuites.
Dans les branches ornant le sentier caillouteux, les chenilles de pyrales du buis descendent en rappel devant mes yeux de monstre blond. Ici, la plupart des buis ont été dévorés l’an passé et il ne reste plus que leurs squelettes dépouillés de verdure.
De retour dans la montagne, je décide un autre jour de rendre visite aux marmottes du Noirmont. Comme l’an passé, je les retrouve dans le même secteur bordé de grands épicéas et de clôtures barbelées.
Ici les marmottes côtoient les montbéliardes, les loges d’alpages et quelques rares randonneurs.
Cette année la colonie a essaimé puisque je remarque vite deux nouvelles portées de marmottons qui ont déjà bien grandi !
L’un des adultes surveille la troupe, avachi sur le mur de pierres sèches qui lui fait office de balcon. A ses pieds, les jeunes courent, s’amusent et s’offrent de temps à autre le luxe d’une pause déjeuner en famille. Je reviendrai d’ici quelques jours lorsque j’aurai une matinée de libre, leur rendre visite à nouveau et photographier leurs joutes champêtres.
Début Août, je me rends en Bresse, à la frontière entre la Saône-et-Loire et le Jura. J’y reste trois jours, je m’offrirai donc deux matinées d’affût flottant en quête des marins-pêcheurs et des aigrettes. La matinée commence bien puisque peu de temps après ma mise à l’eau (waders et tente flottante), un oiseau bleu passe comme une flèche dans le coin de mon œil et s’arrête sur l’un des roseaux de la grande roselière qui borde l’étang-miroir.
La lumière est magnifique, l’oiseau l’est tout autant. L’ambiance me régale et je ne cherche pas pour le moment à approcher davantage. Un second martin-pêcheur vient alors se brancher à une soixantaine de centimètres du premier, sur le même roseau qui se courbe un peu plus.
Une chasse, puis un oiseau disparait. Une seconde chasse, le second oiseau disparait.
Je les retrouve plus tard le long de la ripisylve, ornés de leurs couleurs chatoyantes et de leur vivacité folle. Parfois assez hauts dans les roseaux, parfois plus bas au ras de l’eau. Les ambiances changent, je suis aux anges.
Mais les difficultés pour moi sont assez nombreuses : l’eau est basse dans l’étang et il m’est difficile d’avancer debout, d’autant que les châtaignes d’eau ont une nouvelle fois envahi la surface et ralentissent considérablement ma progression. Sans parler de la « robe de végétation » que je traine derrière moi, accrochée à mon affût et encerclant mes jambes. Difficile pour moi d’avancer sans à-coups ni remous !
Les autres stars de ces deux sorties auront sans conteste été les ragondins. Ces gros rongeurs mal-aimés m’ont offert de belles scènes, de beaux moments à immortaliser entre deux vols de martins-pêcheurs. Parmi les belles rencontres, celle d’un individu perché à plus de trois mètres de hauteur sur un arbre versé dans l’étang. Je n’avais jamais encore vu de ragondin arboricole !
Plus loin, une fratrie de jeunes dort sur un beau tronc échoué, sculpté par des semaines et des semaines de dérive aquatique.
Je m’approche très lentement, et m’arrête à chaque fois que l’un d’eux ouvre un œil. Ils ont le sommeil léger, je dois avancer doucement pour ne pas les faire retourner à l’eau et disparaitre.
Je parviens en plus d’une heure à leur hauteur, sans les avoir apeurés. Quelle chance et quel bonheur ! Je ne me lasse pas de ce rongeur venu d’Amérique. Ses mains lui donnent un air humain, ses grandes moustaches lui donnent un air sympathique, et ses manies de se toiletter sans cesse font chauffer le capteur de l’appareil photos !
Je m’amuse avec leurs reflets dans l’eau calme,
J’attends le moment du repas,
Je guigne les sessions de toilettage.
Tout au long du week-end, j’aurai vu une quinzaine de ragondins. Certains se seront laissés approcher, d’autres auront plongé comme des castors dans le fracas des éclaboussures, à quelques mètres de l’affût alors que je ne les avais pas vus. Ragondins, je reviendrai !
Je termine cet article aux tendances aquatiques avec un écureuil venu faire ses courses dans l’arbre voisin. Les tétines bien en vue, cette femelle a sans doute quelques jeunes qui l’attendent non loin d’ici, à l’abri d’une canopée qui tremble d’excitation !
D’autres voisins ont décidé de se montrer derrière la maison. Deux grandes coronelles lisses, appréciant le retour de la fraicheur et de l’humidité, s’entremêlent dans le roulis des herbes sèches. Comme nous sommes heureux d’avoir de nouveaux voisins !
Voilà pour terminer le fantôme rusé qui est venu prendre sa part sur une carcasse de chevreuil en lisière de forêt. Mais cette fois, je suis arrivé trop tard… La nuit dernière le lynx a fini de tout dévorer...