Le blog de Julien Arbez
02/05/2016
Crocus, morilles et chutes de neige
Je suis bien caché, immobile, couché sous un épicéa en lisière. L’air est frais et mes paupières sont lourdes. La neige a fondu dans les champs et recouvre le sol en forêt. Une heure passe, rien. Une heure 30, rien. Puis j’entends craquer des branches, en face de moi. Il y a quelqu’un ! Ce soir, le brocard est venu sans sa compagne. Peu importe, c’est l’heure de casser la croûte !
Du côté des chamois les choses deviennent sérieuses. Les chèvres sont en fin de gestation et les naissances s’annoncent imminentes. Qu’il neige, qu’il pleuve, il faudra bien sortir !
Dame Biquette murmure-t’elle au petit le secret d’une découverte du monde réussie ?
Sur la petite crête les premières orchidées sont sorties. C’est le début d’une longue série d’éclosion aux couleurs de l’été. Les prairies commencent à reprendre des couleurs et les chamois à retrouver des forces.
Là où la neige vient tout juste de fondre, les crocus parsèment la combe d’étoiles blanches et bleues. Sous mes pas, le sol gorgé d’eau chante à mes oreilles la comptine des bulles en fête. Splach ! Splach !
Et voilà le lièvre prévenu de mon arrivée ! Mais comment tromper des oreilles pareilles ? Ni une ni deux, voilà notre compère filant comme une flèche vers le premier bosquet des alentours.
Sous les épicéas en lisière, les premières morilles noires de la saison (à cette altitude) n’ont pas encore été trouvées par les limaces. Car si ces champignons pour nous sont toxiques à l’état cru, il n’est est pas de même pour nos amies à cornes qui s’en délectent !
Le soir venu, la forêt rougeoie sur les pentes du Turet. Les biches sont sorties du bois, groupées avec les jeunes, pour garantir la sécurité de chacun. Les mâles sont restés à l’écart, je n’en verrai pas aujourd’hui. Mais l’observation dure et le cadeau est beau !
Les animaux sont tranquilles, j’ai même le temps de faire plusieurs images de la scène que je recollerai à la maison pour en faire un panoramique :
Au cours de ce printemps j’ai vécu une rencontre avec un animal que je croise très peu souvent : le mystérieux chat forestier. Grâce à un ami (Antoine Charlier) qui connait bien le secteur, nous avons été gratifiés de la rencontre avec deux chats, dont l’un d’eux a pu être observé de très près. Jamais je n’avais vu de chat sauvage d’aussi près. Les chats sauvages sont extrêmement timides. Ils évitent de s’approcher des humains. Ils vivent en solitaire, parfois en couple, et tiennent un territoire de quelques kilomètres carrés chacun. Un privilège que cette rencontre !
Il y a eu des rencontres sous la pluie au mois de décembre, il y a des rencontres sous la neige le 1er Mai. L’hiver n’a pas encore dit son dernier mot et se remet à chanter sa riturnelle annuelle. Pas de quoi faire peur au chasse-neige, mais de quoi surprendre tout de même ces habitants !
Avec les premiers rayons de soleil , le Flumen qui coule au pied de Septmoncel pour rejoindre Saint-Claude scinde la montagne en deux saisons. Printemps, Hiver. On se demande où les grenouilles, serpents et autres lézards sont partis se cacher, ni même si tous survivront à ces aléas météo. La nature est dure, seuls les plus débrouillards survivront.
Aux Moussières le mois de Mai revêt une allure d’hiver arctique. Plus de renard polaire ici depuis la préhistoire , mais des renards roux en vadrouille en quête de nourriture.
Et pour cause ! Les femelles ont mis bas dans les tannières du Massif, et les renardeaux qui ne sortent pas encore des terriers grossissent de jours en jours. Ils n’ont qu’une ou deux semaines et têteront pendant encore plus d’un mois.
A ce stade, la femelle en lactation a vesoin de 700 grammes de nourriture par jour. Voilà pourquoi l’on voit ressortir les rendrds en fin d’aprèsmidi à cette époque de l’année.
Reste à souhaiter bonne chance à toute la famille !