Le blog de Julien Arbez
12/11/2024
Galop
7h30. Les Alpes rougissent.
Car le soleil vient de se lever sur le Jura !
Au pied de la montagne, le bassin du Léman est noyé sous une épaisse couche de brouillard. Il ne reste plus qu’à voir la montagne sans ses routes, ses villes, sans les vices qui la tournevissent.
Ici la lumière réchauffe le paysage, mes jours, les herbes qui ornent les roches. Les grands corbeaux lancent un écho, les accenteurs leur répondent.
C’est l’heure où les cœurs se réchauffent.
Dans les rochers, j’entends de drôles de bruits.
Après s’être approchés à pas comptés, prudemment, tournant l’un autour de l’autre, tête baissée et museau reniflant le sol, langue pendante et chevrotant, les mâles se jaugent.
De longs moments durant, c’est comme s’ils essayaient de trouver un compromis pour éviter la bagarre. Puis soudain des pierres dévalent la pente, délogées par les sabots des boucs qui se courent après. Les chamois sont en pleine période de reproduction.
Quand certains se repoussent à grandes enjambées, d’autres guettent le remue-ménage du haut de leur promontoire.
Parfois le guetteur les rejoint à pas de course, parfois il reste à l’écart, poussant ses chevrotements d’amoureux transit.
Toute la journée, la montagne remue des mâles transpirants, fait rouler ses pierres, vibrer cœurs et poumons.
Jusqu’à ce qu’une femelle soit prête à s’unir à un mâle. Le dominant sans doute, le plus malin peut-être.
Les ombres tournent, s’allongent, les températures diminuent…
La montagne se vide peu à peu des randonneurs et observateurs à deux pattes.
Les crêtes s’obscurcissent, épousées par les quelques chamois restés haut-perchés. Dans 30 minutes, il fera nuit. Les animaux resteront là, moi je regagnerai ma voiture. Je ne mettrai pas la radio. Je n’écouterai pas de musique. Je revivrai la montagne aussi tard que je le pourrai.