Le blog de Julien Arbez

Derniers champignons et premières neiges

C’est encore plus beau d’être le dernier. La dernière amanite,

le dernier bolet du sous-bois, défendant ses couleurs, attaqué par la noirceur.

Leurs voisins ont dit leur dernier mot. Ils se sont couchés dans les pâturages abandonnés des vaches et des promeneurs à sacs-à-dos.

Pourtant qu’ils sont encore beaux même froissés ! Dommage qu’on en regarde plus les vieux.

Les baigneurs ont déserté la rivière, comme les petites grenouilles vertes et les gerris patineurs. Il a plu, on est bien, là, avec les filles, à regarder les filets d’eau sauter et, tourbillonner.

Les arbres cessent de s’emberlificoter, ils cacheront leurs nœuds comme les humains savent le faire quand l’hiver sera dans leur tête.

Et un matin, un beau matin, les flocons sont là.

Alors vite vite, j’enfile mes chaussures, mon bonnet, mes gants, vite je rejoins la falaise et ses champis, ses glaçons pendants, ses gerbes d’herbes transies, ses oiseaux assommés sans doute. S’y étaient-ils préparés ?

Le tichodrome est toujours là, voilà bientôt deux mois qu’il arpente les frontons de la vallée.

Il est bien petit cet oiseau devant la muraille de calcaire qui nous surplombe !

Bien visible lorsqu’il est en mouvement, il se font dans le décor dès lors qu’il cesse de bouger. 

Je regarde obstinément, attentif à quelque chose qui bougerait, au-dessus de moi, derrière. Parfois une feuille tombe et mon cœur sursaute.

Quand il apparait, je ressens un élan vital, une satisfaction qui reste intacte malgré les années qui passent.

Que pourrai-je aimer aussi fort et longtemps que l’animal qui me surprend ?